En réaction à l’inflation galopante et aux prix élevés des produits de base, la Banque du Canada a décidé aujourd’hui de relever son taux directeur de 25 points de base, une première hausse depuis 2018. Talley Léger explique la réaction des marchés, les risques potentiels et pourquoi c’est important pour les investisseurs.
En réaction à l’inflation galopante et aux prix élevés des produits de base, la Banque du Canada a décidé aujourd’hui de relever son taux directeur, qui passe de 0,25 %, soit le bas de sa fourchette effective, à 0,50 %. Cependant, la Banque a reconnu que l’incertitude géopolitique s’est accrue et a déclaré qu’elle entend poursuivre son programme de réinvestissement, en vertu duquel elle va continuer d’acheter des obligations du gouvernement du Canada uniquement pour remplacer les titres arrivant à échéance, ce qui aura pour effet de maintenir ses avoirs à un niveau relativement élevé pour le moment.
La Banque du Canada a pris de nouvelles mesures bellicistes pour supprimer le soutien monétaire de l’ère de la pandémie et a préparé les marchés à la nécessité d’un éventuel resserrement quantitatif (RQ). En plus de procéder à des hausses de taux, les autorités canadiennes envisagent désormais de mettre un terme au programme de réinvestissement en laissant les obligations du gouvernement du Canada qu’elles possèdent venir à échéance au lieu de les renouveler, réduisant ainsi la taille du bilan de la Banque du Canada, qui est énorme en ce moment.
Comment les marchés ont-ils réagi?
Le dollar et les marchés boursiers canadiens se sont redressés immédiatement après la première hausse de taux d’intérêt de la Banque du Canada depuis septembre 2018. Pour leur part, les obligations du gouvernement du Canada se replient et la courbe des taux s’aplatit, tendance qui, à mon avis, devrait se poursuivre tout au long du cycle de resserrement de la Banque du Canada. Pour que l’aplatisseur de marché baissier puisse se transformer en aplatisseur de marché haussier, je soupçonne qu’il faudra réduire la production, atténuer les perturbations des chaînes d’approvisionnement et calmer l’inflation.
Quels sont les risques?
Je ne voudrais pas être un décideur dans ce contexte d’incertitude géopolitique accrue et de chocs d’offre énergétique. Si une banque centrale réagit exagérément aux pressions inflationnistes, cela risque de restreindre les conditions financières, de miner la confiance et peut-être même de ralentir la croissance économique. Par contre, si l’intervention monétaire est insuffisante, cela pourrait exacerber les pressions inflationnistes ainsi que leur effet déstabilisateur sur la consommation et le rythme de l’activité économique.
Cependant, pour employer une métaphore de golf, je dirais que la Banque du Canada a frappé un coup d’allée. D’une part, les décideurs canadiens en ont fait juste assez pour envoyer un signal, en procédant à une hausse de 25 points de base au lieu de 50 points de base, disant que l’orientation des taux d’intérêt est en train de passer de stable à haussière. D’autre part, elle s’est arrêtée avant l’étape du RQ et n’a pas laissé son portefeuille d’obligations du gouvernement du Canada commencer à diminuer.
En quoi est-ce important pour les investisseurs? Quelles conclusions peut-on en tirer du point de vue des placements?
À tout le moins, je crois que les marchés boursiers canadiens et le secteur de l’énergie sont des couvertures géopolitiques intéressantes dans cette conjoncture très tendue.
J’ai l’impression que le Canada s’en sort généralement mieux dans une conjoncture de forte croissance économique mondiale, de hausse des prix des produits de base, d’appréciation du dollar canadien et de hausse des taux d’intérêt, autant d’éléments qui sont déjà en place.
Le graphique suivant montre que les actions canadiennes ont tendance à mieux se comporter lorsque les prix des produits de base augmentent (une forme d’inflation), comme c’est le cas depuis le début de 2020. Bien que le Canada soit un pays développé, il dépend de l’extraction des ressources, si bien que la hausse des prix des produits de base a été un maillon important d’une chaîne d’événements positifs pour le Canada. En termes simples, je crois que ce qui est bon pour les prix des produits de base est généralement bon pour l’économie canadienne.
Début du cycle des produits de base (bleu foncé) et rendements des actions canadiennes (bleu clair) depuis l’an 2000

Conclusion, la croissance économique, le début du cycle des prix des produits de base (tels que mesurés par l’indice des produits de base industriels du CRB), le huard et les actions canadiennes évoluent généralement dans la même direction au fil du temps. Toutes ces catégories d’actifs sont les « premières à réagir » et sont extrêmement sensibles aux moindres changements des perspectives économiques nord-américaines, qui restent relativement stables pour le moment.