Après un an de repli des données fondamentales, les bénéfices pourraient passer en vitesse supérieure. Et les actions?
Pendant la première année du nouveau cycle du marché, les actions américaines ont affiché des rendements élevés tandis que les ratios cours/bénéfice (C/B) ont augmenté et les paramètres fondamentaux des entreprises se sont détériorés. Les investisseurs se sont évidemment demandé comment les actions américaines pouvaient se comporter aussi bien alors que les bénéfices étaient si décevants.
La combinaison de ratios C/B en progression et de bénéfices en recul est cependant loin d’être inhabituelle. Au cours des quatre dernières récessions, y compris la récession actuelle, les bénéfices des sociétés ont systématiquement reculé et les ratios C/B ont progressé (figure 1).
Figure 1. Au cours des trois dernières récessions, les bénéfices des sociétés américaines ont systématiquement reculé et les ratios C/B ont augmenté; la présente récession ne fait pas exception.

Pourquoi? Cela tient en partie à l’effet de dénominateur. La baisse des bénéfices (B) entraîne la hausse du ratio C/B. Autre explication : les actions, qui sont des indicateurs avancés de l’activité économique, devancent les bénéfices des sociétés de trois à six mois. À l’approche de creux prononcés du cycle économique, les cours des actions (C) ont tendance à anticiper les reprises; c’est ce qui s’est produit pendant la dernière année.
Les actions ne sont-elles pas surévaluées?
En cette deuxième année du cycle du marché, les investisseurs se préoccupent maintenant des valorisations boursières ambitieuses, qui laissent apparemment peu de place à d’autres gains.
Néanmoins, l’histoire nous enseigne que les actions américaines se sont suffisamment appréciées pour justifier leurs multiples après chaque récession depuis le début des années 1990. Dans chaque cas, c’est la rapidité de l’enclenchement de ce processus qui a suscité des interrogations. Au début des années 2000, les ratios C/B ont atteint un sommet un peu plus d’un an après que les bénéfices ont culminé.
À l’heure actuelle, on pense que le marché boursier est proche de la fin de la transition du pic des bénéfices vers celui des multiples (figure 2).
Figure 2. Il se peut que les actions américaines s’apprécient suffisamment pour justifier leurs multiples, comme cela a été le cas après chaque récession depuis le début des années 1990.

Qu’est-ce qui est préférable pour les actions : la hausse des ratios ou la croissance des bénéfices?
Mes recherches font ressortir un élément particulièrement important : les actions ont enregistré des rendements constamment supérieurs à 10 % pendant les épisodes de croissance positive des bénéfices depuis 31 ans, indépendamment de l’évolution des multiples.
Bien que le marché boursier ait très bien fait l’an dernier, la combinaison de la progression des ratios C/B et du recul des bénéfices n’a pas toujours été favorable aux actions. Depuis 1990, la croissance négative des bénéfices et la progression des ratios ont généré des rendements boursiers inférieurs à la moyenne (c.-à-d. stationnaires).
En fait, la hausse des ratios a contribué à l’enregistrement de rendements positifs inférieurs à 10 % au début des années 1990 et en 2015-2016. Cela n’a toutefois pas été le cas au début ni à la fin des années 2000, période pendant laquelle les rendements ont été fortement négatifs (figure 3).
Figure 3. La hausse des ratios est favorable aux actions, mais c’est en période de croissance positive des bénéfices que les actions américaines se sont le mieux comportées, indépendamment de l’évolution des ratios.

Après un an de détérioration des paramètres fondamentaux des entreprises, quelles sont les perspectives pour les bénéfices?
La bonne nouvelle, c’est que la croissance non lissée des bénéfices émet déjà les premiers signaux de l’atteinte d’un creux, ce qui s’apparente beaucoup au processus observé pendant la récession économique relativement brève et peu significative de 2001.
De prime abord, le terrorisme et les pandémies ont peu en commun. Or, les économies de 2001 et 2020 ont toutes deux subi des chocs endogènes qui ont provoqué la peur et des fermetures, suivies de reprises rapides de la confiance, de la mobilité et des conditions économiques.
Pour l’avenir, mon cadre d’analyse des indicateurs avancés donne à penser qu’une reprise en V de la croissance des bénéfices supérieure à 20 % est imminente.
Comme l’a chanté autrefois Frank Sinatra, « J’ai cueilli une prune dans l’arbre de vie. Tu es arrivée et l’air a vibré de bruissements. Il y a fort à parier maintenant que le meilleur reste à venir ».
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