Boussole hebdomadaire des marchés : Le cas d’Israël pourrait donner un avant-goût de ce à quoi peuvent s’attendre les États-Unis et le Royaume-Uni, de même que tous les autres pays lorsque la majeure partie de la population aura été vaccinée
Il y a un mois, je vous ai parlé des énormes progrès d’Israël en matière d’inoculation des citoyens contre la COVID-19. Je vous avais dit que nous allions suivre de près les statistiques économiques en Israël pour voir ce à quoi les États-Unis et le Royaume-Uni (qui progressent rapidement dans la vaccination de leurs populations respectives) pourraient s’attendre dans un proche avenir, ainsi que tous les pays qui auront vacciné une bonne partie de leur population. À la lumière de ce qui précède, je crois que le moment est venu de revenir sur le cas d’Israël pour voir l’impact de l’immunisation de masse sur son économie. De toute évidence, la campagne de vaccination en Israël a non seulement eu un impact considérable sur la confiance des consommateurs, mais aussi sur les dépenses.
Les statistiques d’Israël montrent l’impact des vaccins
La vaccination a débuté seulement en décembre, mais s’est accélérée rapidement. Le 4 avril, Israël avait administré au moins une dose d’un vaccin contre la COVID-19 à 59 % de sa population et 54 % avaient reçu les deux doses.1 L’impact économique n’a pas tardé à se faire sentir. À mesure que la morbidité a diminué, les restrictions ont été assouplies et le troisième confinement a été annulé, si bien que l’indice composé de la situation économique de la Banque d’Israël a augmenté de 0,4 % en février.2
La mobilité, qui s’est révélée un bon indicateur de l’activité économique, a augmenté substantiellement. À la fin de mars 2021, la mobilité du commerce de détail et des loisirs (restaurants, cafés, centres commerciaux, cinémas, etc.) avait diminué de seulement 6 % par rapport à janvier 2020 et la mobilité des épiceries et des pharmacies était même plus élevée qu’au début de 2020.3 Et, comme on pouvait s’y attendre, l’activité économique s’est accélérée en mars. Les données quotidiennes des cartes de crédit montrent que la valeur des transactions pour la semaine terminée le 22 mars est 15 % plus élevée qu’en janvier 2020.4 En comparaison, en avril 2020, la valeur des transactions avait chuté de plus de 40 % par rapport à janvier 2020.4 La remontée des dépenses a été la plus forte dans certains des secteurs les plus durement touchés par la pandémie, en particulier les loisirs et le tourisme.
Pourquoi est-ce différent cette fois-ci?
En quoi cette réouverture de l’économie est-elle différente des précédentes, comme celle du printemps 2020? Avant la vaccination à grande échelle, la réouverture d’une économie était une arme à double tranchant. En règle générale, une réouverture est suivie, après un certain temps, d’une augmentation du nombre de cas d’infection à la COVID-19. En outre, l’accroissement de l’activité économique est généralement modéré du fait que certains consommateurs hésitent à sortir et à dépenser, malgré la réouverture pour des raisons de santé et de sécurité.
Je crois que cette fois-ci, c’est différent parce que les consommateurs vaccinés seront probablement plus enclins à s’adonner aux activités économiques d’avant la pandémie et, selon les recherches médicales, devraient être bien protégés contre la COVID-19. Par conséquent, les dépenses ne devraient pas diminuer autant que lors des réouvertures précédentes. La réouverture en Israël montre déjà que la vaccination entraîne une légère hausse de la consommation et il n’y a pas eu d’autre vague d’infection à la COVID-19.
Un avant-goût de ce à quoi peuvent s’attendre les États-Unis et le Royaume-Uni
À mon avis, l’état actuel de la situation en Israël illustre ce à quoi nous pouvons bientôt nous attendre dans des pays comme les États-Unis et le Royaume-Uni, de même que tous les autres pays lorsque la majeure partie de la population aura été vaccinée. Aux États-Unis, 31 % de la population a reçu au moins une dose d’un vaccin et 18 % a reçu les deux doses.1 Au Royaume-Uni, 47 % de la population a reçu au moins une dose d’un vaccin contre la COVID-19, mais seulement 7,8 % de la population a reçu les deux doses.1
L’économie américaine connaît déjà une amélioration significative, encore aidée par la relance budgétaire. Par exemple, le rapport de mars sur le marché de l’emploi fait état d’une augmentation nettement supérieure aux attentes des emplois non agricoles, qui se chiffre à 916 000 $.5 En outre, les résultats de l’indice PMI du secteur tertiaire de l’ISM pour mars, qui viennent d’être rendus publics, sont eux aussi bien meilleurs que prévu, à 63,7 points, et indiquent que les dix-huit industries du secteur tertiaire ont enregistré une croissance.6 Le seul hic est que le nombre de cas d’infection à la COVID-19 augmente dans certains États des États-Unis. Par conséquent, les campagnes de vaccination devront maintenir leur élan pour ralentir et, finalement, stopper la hausse du nombre de cas d’infection.
Le cas du Royaume-Uni est un peu plus compliqué et ne s’est pas encore traduit par une amélioration aussi marquée car les mesures de confinement reliées à la pandémie demeurent relativement strictes, malgré un assouplissement graduel.
Retombées sur les placements
Je crois que l’accélération de la vaccination et l’amélioration des statistiques économiques vont contribuer à une hausse soutenue des taux obligataires et à des rendements supérieurs des titres de sociétés à plus petite capitalisation et cycliques, en particulier dans les pays qui dominent la reprise.
Cependant, je tiens à préciser qu’aux États-Unis, il y a quelques nuages à l’horizon, notamment en raison des craintes grandissantes d’une hausse des impôts. Je crains que ce soit le lot d’un certain nombre de pays accablés par une hausse du taux d’endettement provoquée par la pandémie. Bien que ce soit loin d’être la réalité en ce moment, si une hausse des impôts devient plus probable, en particulier une forte hausse des impôts sur les sociétés, nous pourrions assister à une alternance des titres les plus performants, si minime soit-elle, en faveur des titres à plus grande capitalisation et plus défensifs. Cependant, il est important de souligner que je ne crois pas que cela mettrait fin à la reprise boursière, mais pourrait simplement provoquer une alternance des titres les plus performants.
Mais pour le moment, l’accent est mis sur le virus et les efforts de vaccination. Comme l’indique l’indice Brookings-FT de suivi de la reprise économique mondiale, la capacité de contrôler la COVID-19 sera probablement le facteur déterminant de la réussite économique en 2021.7 C’est la raison pour laquelle l’indice montre que les grandes puissances économiques comme la Chine et les États-Unis mènent la reprise mondiale. L’indice laisse présager que nous n’assisterons peut-être pas à un redressement économique mondial concerté et qu’il pourrait y avoir un décalage entre les pays, en particulier ceux de l’Europe et de l’Amérique latine, compte tenu de la lenteur du déploiement des vaccins et des difficultés générales à contrôler le virus. Ce n’est pas surprenant et c’est un phénomène que nous avions prévu l’année dernière lors de l’élaboration de nos perspectives pour 2021. Autrement dit, nous croyons qu’une reprise économique se prépare aux quatre coins du monde, mais le moment et l’ampleur du redressement seront dictés par le contrôle du virus et le déploiement des vaccins. Nous allons suivre la situation de près.
1 Source : The New York Times, « Tracking coronavirus vaccinations around the world », 4 avril 2021
2 Source : La Banque d’Israël, 24 mars 2021
3 Source : Google, « COVID-19 : Rapport sur la mobilité communautaire », 31 mars 2021
4 Source : La Banque d’Israël
5 Source : Bureau américain de la statistique du travail, 2 avril 2021
6 Source : ISM Services Survey, mars 2021 7 Source : Brookings, « April 2021 update to TIGER: The world economy stumbles toward a two-track recovery », 4 avril 2021