La pandémie de COVID-19 qui a éclaté au début de janvier est un choc exogène qui a interrompu le cycle de croissance mondial au moment où l’économie mondiale s’apprêtait à amorcer un redressement cyclique synchronisé. En raison de ce choc, notre cadre de gestion macroéconomique est passé en mode contraction mondiale en février (c’est-à-dire que la croissance mondiale devrait être inférieure à la tendance et ralentir).
Ce mode demeure en place aujourd’hui et s’applique de façon généralisée à toutes les régions (Figure 1). Qui plus est, compte tenu du resserrement des mesures de confinement et de quarantaine par les gouvernements des quatre coins du monde, il est fort probable que la plupart, sinon la totalité, des pays et régions connaissent une forte récession pendant la première moitié de 2020. Ainsi, nous nous attendons à une détérioration marquée des statistiques économiques au cours des prochains mois.
À ce stade-ci, il est difficile de savoir pendant combien de temps cette conjoncture macroéconomique va durer. Par le passé, les périodes pendant lesquelles notre cadre de gestion macroéconomique est passé en mode contraction ont duré en moyenne six mois, mais leur durée a varié énormément, allant de deux à 15 mois en ce qui concerne tous les épisodes survenus depuis les années 70. Nous allons continuer de suivre les données jusqu’à la fin du cadre de gestion en cours, mais il est néanmoins utile de comparer le repli actuel aux récents épisodes d’agitation des marchés financiers, malgré des différences importantes quant à la source du choc et les déséquilibres du marché.
Figure 1 : Toutes les régions sont en mode contraction et la situation va probablement continuer de se détériorer
Month/Month Acceleration = Accélération mensuelle; Recovery = Reprise; Contraction = Contraction; Expansion = Expansion; Slowdown = Ralentissement; December 2019 = Décembre 2019; March 2020 = Mars 2020; China = Chine; Japan = Japon; UK = R.-U.; US = É.-U.; Eurozone = Zone euro; EM ex-China = ME excl. Chine; Below trend = Inférieure à la tendance; Growth output = Croissance de la production; Above trend = Supérieure à la tendance;
Source : Recherches exclusives de l’équipe de Solutions de placement Invesco, 31 mars 2020.
Les rendements passés ne garantissent pas les rendements futurs.
Un élément, en particulier, ressort du repli actuel. Les décideurs ont tiré de précieux enseignements de la crise financière mondiale de 2008 (CFM) et de la crise de la dette européenne (CDE) et ont réagi en à peine quelques semaines, au lieu de plusieurs mois, comme ce fut le cas lors de la CFM et de la CDE.
Cette fois-ci, l’intervention budgétaire et monétaire dans le monde a été significative, tant par sa taille que par sa portée, et dans certains cas, extraordinaire. Dans de nombreux pays, les mesures budgétaires sont encore plus généreuses que lors de la CFM; c’est notamment le cas des États-Unis, dont le programme de relance budgétaire équivaut à environ 9,2 % du PIB (soit près du double de lors de la CFM), et de l’Europe, qui a instauré un programme à hauteur de 2,6 % du PIB (comparativement à 2,3 % du PIB lors de la CFM), en plus des programmes supplémentaires transitoires et conditionnels de dettes garanties, qui pourraient osciller entre 10 et 25 % du PIB dans certains pays d’Europe, s’ils décident de s’en prévaloir.1 Enfin, étant donné que les pays ont tendance à procéder au retrait graduel des mesures de relance, l’aide budgétaire sera probablement substantielle pendant plusieurs années.
De même, les grandes banques centrales n’ont pas tardé à promulguer des mesures visant à assouplir les conditions de crédit et à injecter des liquidités dans le système financier, ce qui a entraîné des baisses de taux d’intérêt et l’adoption de mesures d’assouplissement quantitatif illimitées. La Réserve fédérale américaine (Fed) est allée encore plus loin en devenant le prêteur de dernier recours et en offrant du soutien financier aux entreprises sur les marchés primaire et secondaire. 2 Malgré l’énorme incertitude et les difficultés de la situation actuelle, on peut présumer que ces mesures vont contribuer à stabiliser les marchés, à limiter les dégâts causés à l’économie par les quarantaines imposées et à accélérer l’éventuelle reprise.
Bien qu’il soit difficile d’anticiper le moment du creux cyclique, nous nous attendons à ce que le revirement se manifeste d’abord dans les anticipations de croissance implicites du marché, car les prix des actifs devraient actualiser l’impulsion positive des politiques budgétaires et monétaires avant les statistiques économiques (Figure 2). Comme dans la plupart des récessions, nous nous attendons à ce que les marchés des titres de créance ouvrent la voie et signalent une stabilisation du coût du capital et un point d’inflexion des titres risqués, avant les bénéfices ou les bénéfices prévisionnels.
Figure 2 : Les anticipations de croissance implicites du marché ne signalent pas encore un creux de cycle
Global LEI = IEA mondial; GRACI = ICMAR; Global LEI Level = Niveau de l’IEA mondial; 102.0 = 102,0;
Sources : Bloomberg L.P., MSCI, Citi, Barclays, JPMorgan et recherches et calculs de Solutions de placement Invesco de janvier 1992 à mars 2020. L’Indicateur économique avancé mondial (IEA mondial) est une mesure exclusive et prospective du niveau de tendance macroéconomique. L’indicateur du cycle mondial d’appétit pour le risque (ICMAR) est une mesure exclusive du sentiment des marchés à l’égard des risques. À des fins d’illustration uniquement. Rien ne garantit que ces opinions se révéleront exactes.
Positionnement du portefeuille
Du point de vue de la répartition stratégique de l’actif, pour les investisseurs qui ont un horizon temporel de plusieurs années (plus de 5 ans), nous croyons que le repli mondial actuel constitue une occasion unique de rééquilibrer les expositions aux actifs risqués (actions et titres de créance) en fonction de leurs cibles stratégiques à des valorisations beaucoup moins chères.
Sur le plan de la répartition tactique de l’actif (sur un horizon de moins de 2 ans), nous croyons qu’il vaut mieux se montrer plus sélectif à l’égard des actifs risqués et de maintenir un positionnement défensif. Le risque total de nos portefeuilles mondiaux 60/40 est légèrement inférieur à celui de l’indice de référence.3 Par rapport à l’indice de référence, nous continuons de sous-pondérer quelque peu les actions, principalement dans les marchés émergents, et de surpondérer les obligations d’État, et privilégions les titres des pays dont la courbe des taux a une pente plus forte. Du côté des actions, nous privilégions les titres à caractère défensif, surtout ceux à faible volatilité, de qualité et qui bénéficient d’un élan, mais avons réduit la pondération des (petites) capitalisations et des titres de valeur. Par contre, ces deux dernières semaines, nous avons commencé à surpondérer les titres de créance en investissant dans des obligations américaines de première qualité et dans des obligations d’État des marchés émergents, ce qui constitue un premier pas pour bénéficier de primes de risque attrayantes.