Les attentes d’inflation des marchés ont augmenté ces derniers jours, après que des signes de croissance des salaires (souvent perçus comme un présage d’inflation) sont apparus dans le rapport sur l’emploi de janvier. À Invesco Fixed Income, nous croyons que les craintes des investisseurs à l’égard de l’inflation ont contribué à la hausse des taux d’intérêt, ce qui s’est répercuté sur les marchés des titres de créance, car les craintes de hausses des taux d’intérêt (et leurs retombées possibles sur les entreprises) ont fait chuter les cours boursiers et d’autres titres risqués.1
Nous avons remarqué depuis un moment que les investisseurs semblent sous-estimer l’inflation et que les signes de pressions possibles sur les prix pourraient perturber les marchés. L’inflation est un risque que nous surveillons de près, car les craintes d’inflation pourraient inciter la Réserve fédérale américaine (Fed) à remonter les taux d’intérêt plus vite et plus haut qu’on s’y attendait à l’origine. Une politique monétaire plus restrictive pourrait entraîner un resserrement des conditions de crédit, ce qui risque de nuire aux marchés financiers.2 Le taux d’inflation réalisé est très bas, mais la récente volatilité révèle que les détenteurs d’obligations commencent à craindre une augmentation marquée de l’inflation en raison de la forte croissance alimentée par les baisses d’impôt de fin de cycle.3 À notre avis, comme peu d’investisseurs anticipent une hausse marquée de l’inflation, cela pourrait prendre les marchés par surprise.
Or, si l’on se fie à notre prévision d’inflation pour 2018 (1,8 %), il est très peu probable que l’inflation atteigne rapidement un niveau qui préoccuperait la Fed. Nous ne disons pas que l’inflation est disparue, mais nous ne croyons pas non plus qu’elle va influencer la politique monétaire de sitôt. Bien que les craintes entourant la hausse du taux d’inflation puissent faire grimper les taux d’intérêt, il nous semble prématuré pour les marchés d’anticiper une forte réaction de la Fed.
Selon nous, les récents mouvements des marchés découlent davantage du repositionnement des portefeuilles des investisseurs que de changements majeurs des caractéristiques fondamentales de l’économie ou des conditions de crédit. Ces mouvements ont peut-être été accentués par certains produits financiers sensibles aux soubresauts de volatilité.
Quant aux caractéristiques fondamentales de l’économie, Invesco Fixed Income estime que la forte croissance, alimentée par des politiques monétaire et budgétaire accommodantes, devrait se poursuivre et qu’il est peu probable que l’inflation s’accélère d’ici deux à trois mois.4 À notre avis, les caractéristiques fondamentales ne justifient pas une telle volatilité des marchés. Cela étant dit, nous nous attendons à ce que les titres risqués se comportent bien lorsque la volatilité va s’estomper, compte tenu de la forte croissance (nous nous attendons à un taux de croissance de 2,75 % cette année), de la faible inflation et des bas taux d’intérêt.
Point de vue d’Invesco Fixed Income sur les principales catégories d’actif :
Titres de bonne qualité
Les primes de rendement des obligations de bonne qualité ont diminué depuis le début de l’année.5 À notre avis, la chute considérable de l’offre d’obligations de sociétés a été favorable, car cela signifie que les sociétés ont rapatrié des capitaux, plutôt que d’émettre de nouvelles obligations de bonne qualité. Malgré la recrudescence de volatilité des derniers jours, les primes de rendement des titres de bonne qualité ont tenu le coup.6 Les liquidités semblent moins élevées qu’à l’habitude, mais les marchés fonctionnent normalement.7
Nous analysons avec beaucoup d’intérêt les retombées de la réforme fiscale sur l’inflation, surtout les pressions exercées sur les salaires. En soi, l’inflation ne nuit habituellement pas aux primes de rendement, mais il pourrait en être autrement si la Fed décidait de relever les taux d’intérêt pour contenir l’inflation. Nous pensons que les marchés devront réévaluer leurs attentes d’inflation et de politique monétaire pour que la stabilité puisse s’installer.
Dans une perspective à plus long terme, nous sommes d’avis qu’une plus forte volatilité pourrait générer des occasions de placement attrayantes dans certaines obligations de qualité supérieure, à rendement élevé et de bonne qualité. Nous avons eu du mal à dénicher de telles occasions par le passé. Nous croyons que la trajectoire positive de l’économie continue de favoriser les titres de créance, mais sommes conscients des risques accrus de volatilité et de la nécessité de pouvoir s’adapter au changement.
Titres à rendement élevé
Le marché des titres à rendement élevé a subi des pressions à la baisse par suite du récent repli des titres risqués, mais surclasse l’indice S&P 500 depuis le début du mois.8 En gros, la récente volatilité des marchés a eu très peu d’incidence sur les titres à rendement élevé. En ce moment, les caractéristiques fondamentales du marché des titres à rendement élevé sont très bonnes et les conditions de crédit sont plutôt favorables. Selon nous, ces facteurs qui sous-tendent ce marché n’ont pas changé au cours des dernières semaines. Même si, dans l’ensemble, les primes de rendement des titres à rendement élevé sont serrées, certains titres recèlent toujours un potentiel de plus-value.9 Au chapitre du rendement, les excellentes caractéristiques fondamentales sous-jacentes devraient nous permettre de revenir à un marché sain, où les primes de rendement vont continuer de diminuer. Par le passé, les titres à rendement élevé ont obtenu de bons rendements en périodes de hausse des taux d’intérêt, parce que les bénéfices augmentent et le risque de défaut diminue lorsque l’économie est plus dynamique.10
Marchés émergents
Dans l’ensemble, la volatilité a été plus faible que ce à quoi nous nous attendions dans les marchés émergents, compte tenu du repli marqué des marchés boursiers des pays industrialisés. Nous pensons que cela est dû aux conditions de crédit relativement souples, malgré un léger resserrement. Par le passé, le dollar américain s’est souvent apprécié en périodes de hausse des taux des bons du Trésor américain, mais ce ne fut pas le cas récemment, si bien que les conditions de crédit sont demeurées souples.
À notre avis, le plus gros risque qui plane sur les titres de créance des marchés émergents est une appréciation du dollar qui provoquerait un resserrement marqué des conditions de crédit; cela pourrait entraîner une augmentation des primes de rendement des titres des marchés émergents et une dépréciation des devises des marchés émergents par rapport au dollar. Sinon, nous nous attendons à ce que les titres des marchés émergents se comportent plutôt bien.
Selon nous, le récent repli des marchés financiers ne laisse pas présager un ralentissement de la croissance mondiale, mais plutôt un court épisode de volatilité des marchés. À moins que le repli ne s’intensifie et ne nuise considérablement aux conditions de crédit, nous ne voyons pas la nécessité de rajuster nos prévisions de croissance des marchés émergents, de caractéristiques fondamentales ou de rendement des titres de créance des marchés émergents pour cette année.
Titres à revenu fixe européens
Le taux des obligations d’État allemandes de référence à 10 ans a augmenté, passant de 40 points de base au début de l’année à 75 points de base la semaine dernière.11 Cette hausse est survenue en réaction aux propos optimistes du président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, et au fait que les investisseurs savent que les mesures d’assouplissement quantitatif (AQ) dans la zone euro prendront fin bientôt. D’après notre analyse, la BCE pourrait mettre fin à son programme d’achat d’obligations dès septembre, après quoi on s’attend à ce que d’autres investisseurs prennent le relais.
Même s’il se peut que les marchés réagissent de façon exagérée, nous ne croyons pas que le repli des marchés obligataires européens va s’intensifier, à moins que nous ne commencions à voir des signes d’accélération de l’inflation. Notre analyse nous indique que les pressions inflationnistes mondiales pourraient demeurer faibles pendant environ six mois encore, ce qui permettrait à la BCE de maintenir une politique monétaire accommodante. À notre avis, un resserrement lent et graduel des conditions de crédit accompagné d’une conjoncture économique mondiale dynamique devrait favoriser les actifs à risque. Cependant, en raison de la pénurie de main-d’œuvre qui sévit dans certaines régions, comme en Allemagne, nous pourrions assister à une forte augmentation des salaires et, par conséquent, à une hausse du taux d’inflation. Les probabilités que ce scénario se concrétise ont augmenté ces derniers mois.
Quand les banques centrales du monde entier, y compris la BCE, vont abolir leurs programmes d’AQ en 2018 et commencer à relever les taux d’intérêt, le filet de sécurité va disparaître et les marchés vont devoir survivre sans la demande constante (et rassurante) d’obligations de la BCE. Cela va sans doute attiser la volatilité des marchés, ce qui avantagerait les investisseurs actifs. Lorsque les politiques des banques centrales vont diverger, il se peut que nous assistions à une plus grande dispersion des rendements entre les divers marchés et catégories d’actif, ce qui pourrait multiplier les occasions de valeur relative et sur les marchés des devises et des titres à revenu fixe.